Contexte :
S'il est intuitivement logique de penser qu'il y a un lien entre presbyacousie et troubles cognitifs, il n'y a pas d'étude permettant de l'argumenter. L'objectif d'AcouDem était de démontrer que la prévalence des troubles cognitifs était significativement plus élevée chez les patients âgés atteints d'hypoacousie que chez les patients ayant une audition normale.
Méthode :
Étude épidémiologique transversale comparative dans une population de sujets du quatrième âge vivant en institution. 319 sujets de plus de 75 ans ont été évalués avec une acoumétrie verbale pour l'acuité auditive et trois tests validés pour l'état cognitif. La prévalence des patients atteints de troubles cognitifs a été comparée chez les patients presbyacousiques et chez ceux ayant une audition normale à l'aide d'untest du Chi2.
Résultats :
La moyenne d'âge des sujets était de 85,3 ans. Les groupes avec ou sans trouble auditif étaient comparables pour les autres caractéristiques. Le risque relatif de développer des troubles cognitifs était de 2,48 chez les patients atteints de presbyacousie entraînant une gêne sociale (IC95% = 1,54-3,99, p < 0,0001). Par ailleurs, l'odd-ratio entre presbyacousie et démence persistait, avec un même effet, significatif quelque soit le sexe et la tranche d'âge.
Conclusion :
AcouDem est la première étape de la construction de la preuve du lien entre presbyacousie et démence. Les prochaines étapes consisteront à mener une étude cas-témoin, puis un essai contrôlé randomisé, testant l'efficacité d'un appareillage auditif et d'une rééducation orthophonique sur la réduction du déclin cognitif chez des patients atteints de démence légère à modérément sévère. C'est le futur programme de recherche du GRAPsanté (Lire l'article) .
NNombreuses sont les personnes âgées qui consultent pour des troubles de la mémoire et qui sont confrontées à une série de tests tels que le Mini Mental State Examination (MMSE) permettant de dépister des troubles cognitifs de type Alzheimer. La presbyacousie touchant les fréquences sonores aiguës, un patient atteint de presbyacousie comprendra mieux des phrases graves que des phrases aiguës, à condition qu'il ne soit pas atteint de troubles cognitifs interférant la bonne compréhension d'un message oral. Les résultats de l'étude clinique sur des sujets presbyacousiques appareillés versus des sujets normoentendants montrent que les sujets presbyacousiques appareillés comprennent davantage les phrases graves du test administré pour cette étude que les phrases aiguës. Pour les phrases aiguës, le traitement de l'information auditive entre les normoentendants et les presbyacousiques appareillés diffère de façon significative au seuil de 5% (< 0,0001). Ce qui nous permet de conclure que le test proposé dans cette étude permet avant tout de détecter un trouble du traitement de l'information auditive chez des patients presbyacousiques appareillés car si l'appareillage est indispensable, il n'est pas suffisant pour combler le déficit auditif des phonèmes aigus.
Contexte :
Pour freiner l'évolution d'une démence, il faut stimuler les sens et corriger la qualité des perceptions. Limiter les conséquences de la désafférentation neurosensorielle parmi la population des sujets atteints de démence demeure en ce sens une voie thérapeutique intéressante. En appareillant un sujet dément malentendant on pourrait donc espérer limiter les impacts psychosociaux de la déficience auditive malgré l'évolution du déficit cognitif, qui pourrait elle-même s'en trouver ralentie. Mais cette population de patients est-elle en mesure d'accepter un tel projet de prise en charge ?
Méthode :
Étude prospective observationnelle multicentrique analysant l'adhésion d'une population de sujets déments à un projet d'appareillage auditif et de suivi orthophonique. Un enquêteur unique a rencontré 128 patients déments, a évalué leur audition par le biais d'une acoumétrie vocale, puis a présenté et proposé le projet de prise en charge. Une analyse descriptive des observations a été effectuée.
Résultats :
Au total, 80 patients (soit 62,5% de l'effectif de départ) ont refusé la prise en charge. Seuls 37 patients ont accepté le projet d'appareillage, dont 24 en association à un suivi orthophonique. Parmi les sujets ayant refusé toute prise en charge, une majorité présentait un MMSE plus dégradé (54 % de refus de la part de sujets présentant un MMSE entre 15 et 20). En revanche la sévérité de l'atteinte auditive n'est pas apparue impliquée. Enfin une corrélation statistiquement significative a été confirmée au sein de notre effectif entre sévérité de l'atteinte auditive et sévérité de l'atteinte cognitive.
Conclusion :
Le refus est apparu comme l'attitude privilégiée face au projet d'appareillage. Cela est certainement la conséquence de l'atteinte neurodégénérative, qui altère notamment la notion de « Conscience de Soi ». Néanmoins ce taux de refus ne contraste pas avec les taux observés dans la population générale des malentendants. Il est alors raisonnable de penser qu'en optimisant la procédure menant à la décision, on puisse accroître le niveau d'adhésion. Dans cette optique, le concours d'un éventuel aidant pourrait avoir un impact positif sur cette décision, pourvu que cette démarche s'effectue dans le strict respect des règles de l'éthique.